Lorsque Steinbeisser a vu ce projet, ils m'ont demandé de créer 40 de ces cuillères en pierre pour l'un de leurs dîners locaux, végétaliens, biologiques, artistiques et  étoilés au Michelin. Comment aurais-je pu dire non à cela ? C'était un rêve !

Il y avait cependant un problème : il n'y avait pas de budget, et je ne serais payée que si les cuillères étaient vendues lors du dîner. La Stéatite étant un matériau fragile, et les cuillères sculptées à la main demandant beaucoup de travail, cela n'allait pas suffire. L'idée de lancer une campagne de crowdfunding a alors émergé. Cela me paraissait terriblement effrayant.
Demander de l'argent aux gens, comme ça.

J'ai décidé de me lancer, mais en faisant du projet quelque chose de plus grand que les seules cuillères en pierre. Je voulais créer une série de cuillères ou « outils de dégustation » en céramique, qui reconnecteraient les gens à leur nourriture tout en étant plus solides, plus faciles à utiliser et à fabriquer.

Le crowdfunding a été stressant, mais a finalement été un succès, et j'ai pu commencer la production avec un fabricant de céramique néerlandais.

C'est ainsi qu'est née ma première collection, Evoke.

Peu à peu, j'ai découvert qu'il n'y avait pas beaucoup de fabricants de porcelaine aux Pays-Bas. Après avoir rencontré quelques problèmes de qualité avec le premier fabricant, j'ai dû en chercher un meilleur avant de pouvoir vraiment commencer à vendre la collection.

C'est ainsi que je me suis retrouvée à Limoges, la capitale de la porcelaine française. Je n'avais aucune idée de ce dans quoi je m'embarquais vraiment ; je savais juste que je voulais obtenir la meilleure qualité possible pour mes produits, et la porcelaine de Limoges avait une bonne réputation (et le fait que je sois française et que je parle la langue a également aidé).

Je suis allée à Limoges avec la première série d'outils de dégustation que j'avais créés, en visitant quelques fabricants différents dans l'espoir que l'un d'entre eux accepte de produire mes designs.

J'ai beaucoup appris depuis le jour où ils ont accepté de produire mes créations. Sur la porcelaine, sur la fabrication et les quantités de commande « normales ». Sur les émaux et les températures de cuisson, le rétrécissement et la déformation.
Je suis tellement heureuse de ne pas avoir su tout cela avant de commencer, car je n'aurais probablement jamais commencé en premier lieu et n'aurais probablement jamais imaginé des formes aussi organiques.
Je suis très reconnaissante d'avoir trouvé ce fabricant qui a pris ce risque avec moi.

Mes formes sont toujours difficiles à produire et nécessitent beaucoup de travail, car tout est fait à la main, et elles ne répondent pas aux critères de « perfection » dans le monde de la porcelaine, c'est pourquoi la plupart des fabricants ont refusé au départ. Cependant, c'est exactement ce que je recherche. Ce ressenti artisanal et naturel, avec de légères déformations et imperfections, est ce que je trouve beau. Les assiettes parfaites, toutes exactement identiques, sont assez ennuyeuses pour moi, et ce n'est pas ce que j'essaie de créer. Je suis toujours inspirée par la beauté imparfaite de la nature, que je cherche également à retrouver dans mon travail.
Il est difficile pour les fabricants de comprendre cela, étant tellement habitués à viser la perfection et la production parfaitement identique.
Alors, pouvoir travailler avec un fabricant qui livre la plus haute qualité tout en conservant cet aspect artisanal et organique est quelque chose pour lequel je suis reconnaissante chaque jour.